Sting interviewé par l'équipe de Sting, L'Association
(Paris, 25 mai 1999)
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[L'interview de Fabien Barral]
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Eh oui ! Nous avons pu rencontrer Sting le 25 mai 1999 !!!
Voici notre interview EXCLUSIVE de STING.
EXCLUSIVE, puisqu'il nous a fait l'immense gentillesse de nous recevoir
(nous, les 4 membres de l'équipe) pour l'interviewer au Studio Méga
(Surennes), où il mixait l'album "Brand New Day".
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Commençons par une brève description de l'ambiance telle qu'elle
était ce jour là :
Sting est très amical, très décontracté malgré la fatigue du boulot.
Situation d'interview assez inhabituelle, on manque de chaises ! Sting
propose donc de s'installer à même le grand tapis posé sur le sol, dans
le studio, et nous nous retrouvons tous les 5 assis par terre en tailleur
! L'interview peut commencer...
- L'interview est présentée
ici sous forme d'extraits choisis. Retrouvez-la en intégralité
dans Mercury n°9 -
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Quand avez-vous commencé à travailler sur ce nouvel album ?
J'ai commencé il y a un an, en Italie ; j'ai demandé à quelques musiciens
de venir chez moi en Toscane, on a 'jammé' et rassemblé quelques idées
musicales. J'ai écrit une heure de musique sans aucun texte et sans
aucune idée concernant les chansons; c'est nouveau pour moi, car d'habitude,
j'écris la musique et les paroles ensemble, mais cette fois-ci, je n'ai
écrit que de la musique. J'ai divisé ça en séquences pour former un
album et je partais me balader dans les bois en essayant de découvrir
ce que la musique m'inspirait: des histoires, des personnages, des humeurs,
des personnalités... et petit à petit, les personnages émergeaient ainsi
que les histoires, le fil conducteur, d'une façon très naturelle, inconsciemment.
Ça m'a pris plus de temps que d'ordinaire mais je pense que ça valait
la peine d'être patient. Des fois, je me baladais et rien ne venait
alors que d'autres fois, j'avais des tas d'idées. Actuellement, un an
plus tard, je suis en train de terminer et mixer l'album à Paris; mes
chansons prennent enfin forme, mais au début, elles ne ressemblaient
à rien... En français, (rires) "bonne chance" !
Pourquoi avoir choisi la France et ce studio en particulier pour
faire l'album ?
Eh bien, j'ai mixé "The Soul Cages" en 1990 à Suresnes au studio Guillaume
Tell et ce fut une superbe expérience pour moi de vivre à Paris. J'aime
l'atmosphère, les gens l'architecture... C'est une ville passionnante,
vous le savez, c'est super ! J'avais besoin de quitter l'Italie où j'avais
passé un an et je ne voulais aller ni à New York, ni à Londres, alors
on a choisi Paris. Hugh Padgham, mon producteur, m'a suggéré ce studio
car il est neuf et on peut voir le soleil, ce qui est important car
beaucoup de studios n'ont pas de soleil. On est donc arrivés il y a
un mois et on reste jusqu'à la fin juin. Ça va lentement mais c'est
le type de l'album qui veut ça... C'est très compliqué et lent. Je pense
qu'il sera bon... "j'espère" (en français).
Qui sont les musiciens qui participent à l'album et ceux qui seront
en tournée ?
Il y a beaucoup de musiciens sur ce disque; le noyau fixe du groupe
ne change pas: moi à la basse, Dominic à la guitare, Vinnie à la batterie,
ainsi que Manu Katché. Kenny est décédé, comme vous le savez, donc il
n'est pas sur l'album mais j'ai plusieurs claviers: Don Blackman, un
organiste américain, Dave Hartley, un ami anglais et un autre pianiste
anglais, qui s'appelle Jason Rebelo. Il y a ensuite quelques musiciens
français : Cheb Mami chante sur un morceau (The Desert Rose) et une
rappeuse qui s'appelle Sté; elle chante sur une chanson qui parle d'un
chien, j'ai écrit la chanson comme si j'étais un chien et elle, c'est
ma maîtresse. Je l'aime mais elle est amoureuse d'un homme, alors je
me plains: on s'adorait et cet homme est arrivé. Elle me gronde en français
et me dit que je suis un vilain chien. C'est assez drôle... enfin, c'est
supposé être drôle.
Vous semblez aimer les chiens. Vous aviez déjà écrit "Conversation
With a Dog", il y a quelques années...
J'ai beaucoup de chiens ; aujourd'hui, c'est un triste jour car l'un
de mes chiens est mort la nuit dernière, mais bon, c'était un chien-loup,
il n'était pas en bonne santé... Je crois que j'ai 6 chiens chez moi.
J'aime les chiens, je crois que j'en suis un moi-même. J'ai dû être
un chien dans une vie antérieure et peut-être vais-je encore me réincarner
en chien ! (NDLR : il se trouve que "Perfect Love... Gone Wrong"
parle d'un chien aussi !).
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Est-ce que ce nouvel album sera très différent de "Mercury Falling"
? Quelles sont vos influences sur ce disque ?
Evidemment, c'est un album différent avec des chansons différentes,
mais je dirais qu'il y a un lien avec le précédent, puisqu'on me retrouve
avec les mêmes musiciens, les mêmes sensibilités mais j'aimerais dire
que je me suis amélioré en tant que musicien et compositeur dans ma
spécialité. Peut-être que les chansons ont des influences plus variées;
certaines ont des consonances arabiques, il y a un énorme orchestre
sur deux morceaux.
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Enfin, je ne sais pas, à vous de voir ! Moi, je suis trop proche de
cet album pour le juger. C'est ce que je peux faire de mieux, on travaille
très dur et j'espère que les gens vont aimer. C'est différent de "Mercury
Falling".
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(...)
Quelle chanson avez-vous écrite en premier et dans quel contexte
?
La première chanson que j'ai écrite s'appelle "Ghost Story" ("Histoire
de fantôme") ; elle parle d'une histoire d'amour qui s'est achevée
mais qui revient sans cesse comme un spectre dans l'esprit d'un l'homme
; ce dernier n'arrive pas à l'oublier tant qu'il n'a pas admis qu'il
aimait toujours cette femme. Sa vie entière, il n'a cessé de le nier
et la vérité, c'est qu'il aime toujours cette personne. L'album n'est
pas autobiographique, il parle d'autre personnes ; c'est moi qui m'imagine
dans la peau d'autres individus. Je n'ai pas besoin d'être moi tout
le temps !
Vous avez déjà écrit plusieurs chansons sur votre famille (votre
grand-mère, vos parents, vos enfants: Kate, Mickey, Giacomo... ). Y
a-t-il une chanson dédiée à l'un des membres de votre famille sur cet
album ?
Sur cet album ? Non, enfin, je ne crois pas...
(...)
Jouerez-vous de la contrebasse sur scène ?
Non, car il est difficile d'en faire sortir un son potable dans de grandes
salles parce que c'est un instrument acoustique. En plus, il faudrait
que j'en joue plus, tous les jours, car il faut avoir les doigts musclés
et, enfin, transporter la contrebasse à travers le monde, c'est difficile.
Nous pensions à Brian (c'est la contrebasse électrique fétiche
de Sting)...
J'ai toujours Brian en ma possession, je le garde chez moi, à New York
; je n'y touche plus, il reste dans un coin... il a pris sa retraite
! Mais je joue de la contrebasse sur l'album.
(...)
Beaucoup de fans se posent la question : vous dites que vous préférez
la scène au studio, alors pourquoi ne pas sortir un album 'live', comme
"Bring On the Night" ?
Vous voyez, la raison pour laquelle je préfère la scène, c'est que je
n'ai pas à écouter... (rires). Mais quand vous faites un album 'live',
vous êtes bien obligé d'écouter votre travail, et pour moi, si vous
faites une erreur, le moment est très important ; ça ne dure qu'une
fraction de seconde, ensuite c'est fini. Pour les albums 'live', vous
devez retourner en studio... Mais peut-être que je sortirai un album
de la prochaine tournée si le groupe est bon. On verra, je ne sais pas.
Les fans adorent aussi les vidéos 'live', comme "Summoner's Travels".
Oui, cet album sortira aussi en DVD, format sur lequel il est possible
d'avoir une performance visuelle de l'album. Je pense qu'on fera ça,
mais ça demandera du temps et des efforts.
Pourquoi n'avez-vous pas participé au concert d'Amnesty International
en décembre 1998 ?
Ils m'en ont parlé environ trois jours avant; Peter, Bruce, Youssou
et Tracy étaient présents... il ne manquait que moi, mais j'étais en
studio en Italie, avec plein de musiciens que je ne pouvais pas laisser...
Alors, j'ai dit que je ne pouvais pas venir. Le lendemain, j'ai vu le
concert à la TV et j'étais vraiment triste de ne pas y avoir été; j'aurais
dû y aller car cette tournée était très importante pour moi et être
avec mes amis aurait été vraiment sympa. Je regrette de pas y avoir
été, j'aurais dû faire l'effort... mais il y aura d'autres occasions.
Nous étions au concert. C'était très bien !
"Quel dommage !" (en français)
On vous a vu sur écran géant, ils passaient des extraits de concerts...
Des concerts qui datent de 10 ans, quand nous étions tous jeunes et
beaux (rires)!
Avez-vous des nouvelles d'Andy et Stewart ?
J'ai parlé à Stewart hier ; il venait de passer une semaine à écrire
des chansons avec mon fils Joe, dans le château de Miles en Dordogne.
Il a fait beaucoup de compliments concernant mon fils. Ils sont très
complémentaires, c'est un très bon musicien et une personne très bien.
En ce qui concerne Andy, j'ai chanté sur un morceau ('Round Midnight)
de son dernier album, "Green Chimneys", qui sort en ce moment même.
Donc oui, je suis toujours en contact avec Andy et Stewart ; nous sommes
de très bons amis.
(...)
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A propos de Joe, veut-il faire carrière comme vous ?
Non, c'est un musicien, il a son propre groupe ; sa seule ambition est
d'être lui-même, il ne se compare pas à moi, je ne peux pas vraiment
l'aider. Il se conduit comme une personne "normale", il ne m'utilise
pas... il ne dit pas : "Je suis le fils de Sting, alors vous devez écouter
mon travail"... Il est très modeste, très sensé. Je pense qu'il a beaucoup
de talent mais il travaille à sa façon, il n'est pas dépendant de moi.
Il n'est pas jaloux ?
Non ! Il a confiance en lui, c'est une personne très bien... je suis
jaloux de lui (rires).
Pourquoi ?
Parce qu'il est plus jeune, plus beau et plus talentueux que moi !
Un duo serait intéressant...
Un jour, " peut-être " (en français).
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Une question sur le sport : vous faites du yoga, mais vous aimez
aussi le tennis...
Je préférais le tennis avant car je connaissais les joueurs, comme John
Mac Enroe, avec qui je suis toujours ami, Matts Willander... Maintenant,
je ne connais plus les joueurs, de plus, les services sont trop puissants
et c'est ennuyeux... Je préfère regarder les femmes jouer, c'est plus
intéressant.
Irez-vous à Roland Garros ?
Euh, je pourrais mais je ne sais pas... Le week-end dernier, j'ai vu
équipe de football pour la Coupe d'Angleterre... on a perdu. Demain
soir, je vais regarder le match Manchester United / Munich... J'adore
regarder le foot. D'ailleurs, j'ai assisté à la finale de la Coupe de
Monde !
Vous étiez pour la France ou pour le Brésil ?
J'étais neutre, je voulais voir un bon match, je pense que la France
avait une meilleure équipe. C'était un événement fantastique. J'ai beaucoup
aimé le défilé de mode avant. Ma femme était avec moi, elle se voulait
pas venir, mais je lui ai dit qu'elle adorerait ça : le défilé de mode
et les divertissements. C'était très français et très bon !
Vous souvenez-vous de votre passage dans La Fureur du 31.12.97
avec Pras ? Vous aviez chanté Roxanne '97 et vous aviez l'air triste...
(rires) Vous savez, c'était très dur pour moi, je devais être très concentré
! Je n'aime pas trop faire ça... Je me sentais bizarre et si je ne fais
pas attention, je peux mal chanter. Je voulais éviter ça. Sinon, j'aime
bien Pras.
Vous aimez vraiment les reprises de vos chansons ?
Oui, j'apprécie le point de vue d'autres personnes... La reprise d'Every
Breath You Take par Puff Daddy a été un énorme succès... C'est bien
pour un jeune public, de toute façon, je n'ai pas pu l'arrêter.
Ces reprises "dance" donnent un coup de fouet à votre carrière...
Oui, je le pense aussi... Beaucoup de gens pensent que c'est Puff Daddy
qui a écrit la chanson mais je m'en fiche.
Aimez-vous la "dance music" ?
Oui, mais je ne "dance" pas !
Y aura-t-il des chansons "dance" sur votre album ?
Je pense que le nouvel album sera " dans le vent "...
(...)
Ce qu'on aime, c'est quand vous mélangez divers types de musique.
Oui... Je pense que c'est ce que la majorité de mes fans aime. C'est
ce genre de musique que je fais ; j'aime la musique hybride... quel
est le mot en français ?
Hybride.
"Hybride". C'est ce que j'apprécie d'un point de vue artistique.
La musique "pure" n'évolue pas. Le rock pur, c'est du rock;
quand vous mélangez le rock avec d'autres types de musique, ça devient
quelque chose de nouveau, de plus créatif et évolutif. C'est ce que
je suis : je ne suis pas conservateur.
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Vous avez la liberté de faire ce que vous voulez, en particulier
sur scène...
Oui. L'autre soir, quand je chantais, j'ai réalisé que chanter, c'était
un peu comme voler car ça monte et ça descend. Vous êtes complètement
libre, c'est très sensuel. Chanter est ma plus grande joie... Aussi
longtemps que j'aurai ma voix, ce sera ma vie !
(...)
Extraits tirés de l'interview réalisée par Sting,
l'Association - (traduction : Estelle P. & Leslie P.)
Photos & texte : © STING, L'ASSOCIATION, 1999
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Notre ami Fabien Barral a lui aussi eu la
chance de rencontrer Sting, en 1997.
Cliquez ici pour lire son interview !
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